
Ce matin, en Irak, les élections des conseils provinciaux ont débuté dans le cadre de mesures de sécurité strictes, marquant ainsi les premières élections de ce type dans le pays depuis une décennie. Deux jours auparavant, samedi, un vote « spécial » avait été organisé pour environ 50 000 déplacés et un million de membres des forces de sécurité.
Ces conseils provinciaux ont été instaurés après l’invasion américaine et la chute du régime de Saddam Hussein en 2003. Toutefois, en 2019, sous la pression populaire après des manifestations sans précédent, ils ont été dissous. Les conseils provinciaux détiennent des pouvoirs étendus, notamment l’élection des gouverneurs et la gestion des budgets de la santé, des transports et de l’éducation, financés par des allocations spécifiques dans le budget général, dont 90 % dépendent des revenus pétroliers. Néanmoins, les critiques des conseils provinciaux les considèrent comme des « foyers de corruption favorisant le clientélisme ».
Les bureaux de vote ont ouvert à 7 heures du matin (heure locale) et se refermeront à 18 heures (heure locale) dans les 7 166 bureaux de vote. Environ 17 millions d’électeurs sont appelés à choisir parmi les 6 000 candidats en lice pour 285 sièges dans toutes les provinces.
Parmi les candidats, 1 600 femmes représentent la proportion de 25 % qui leur est réservée. De plus, dix sièges sont dédiés aux minorités chrétiennes, yazidies et sabéennes, dans un pays multiconfessionnel et multiethnique.
Le nombre de sièges dans les conseils provinciaux varie d’une province à l’autre, par exemple, le conseil de la province de Bagdad compte 49 sièges, tandis que celui de la province de Basra en compte 22.
La coalition chiite au pouvoir espère consolider son emprise sur le pouvoir à travers ces élections, malgré le boycott du courant sadriste dirigé par le leader chiite Moqtada al-Sadr, qui a annoncé le boycott des élections dans 15 provinces. Trois provinces relevant du gouvernement régional du Kurdistan ne participent pas non plus à ces élections.
Ces élections locales revêtent une importance cruciale pour le gouvernement de Mustafa al-Kadhimi, qui promet des réformes et le développement des infrastructures dévastées après des décennies de conflits depuis son accession au pouvoir il y a près d’un an, avec le soutien de la majorité parlementaire des partis et mouvements favorables à l’Iran.
Dans une allocution avant les élections vendredi dernier, al-Kadhimi a encouragé les Irakiens à voter, en particulier ceux qui « ressentent et perçoivent le travail du gouvernement et son orientation vers des projets de reconstruction et de développement » afin de « choisir et élire des conseils provinciaux forts en soutien à l’action exécutive ».
Un sentiment de frustration prévaut dans l’opinion publique à l’égard de ces élections dans un pays de 43 millions d’habitants riche en pétrole mais dont les institutions souffrent d’une « corruption chronique », selon les observateurs.
Les prévisions suggèrent un recul de l’alliance « Sairoun » dans les provinces sunnites, suite à la décision de la Cour fédérale suprême en novembre dernier de destituer son chef, Mohammed al-Halbousi, de son poste de président du Parlement.
Quant à la province de Kirkouk, riche en pétrole dans le nord de l’Irak, la compétition devrait être intense, avec un possible retour des tensions entre les différentes composantes de la province, arabes, kurdes et turkmènes.
Renad Mansour, chercheur au centre de recherche « Chatham House », estime que « le taux de participation est le dernier indicateur de la satisfaction et de savoir si la politique populiste et économique de al-Kadhimi, ainsi que sa politique d’octroi d’emplois, sont couronnées de succès et capables d’attirer la nouvelle génération ou non ».
Selon des experts cités par Reuters, ces élections renforceront la position des partis et des mouvements alliés à l’Iran, détenant la majorité parlementaire et représentant les partis chiites traditionnels ainsi que certaines factions du Hachd al-Chaabi.
Mansour estime que les élections locales sont une « opportunité » pour ces partis « de revenir et de prouver qu’ils ont une base sociale et populaire », soulignant une « compétition féroce au sein du bloc chiite », où ses différentes composantes cherchent à prendre le contrôle des postes de gouverneurs.
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